Les enjeux du nucléaire civil européen et de la coopération communautaire

Web conférence

Évènement
Date : le 11 juin 2021 de 10h00 à 11h30

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La FRS en partenariat avec l'ambassade de Lituanie à Paris, organisait un webinaire sur Les enjeux du nucléaire civil européen et de la coopération communautaire le 11 juin 2021 de 10h00 à 11h30.
 
Dans un contexte de relance de l'intérêt de nombreux pays européens et extra-européens pour les technologies électronucléaires, plusieurs sujets d'importance émergent. La coopération communautaire sur ce secteur stratégique, initiée avec le Traité Euratom en 1957, le futur de la base industrielle et technologique, l'appréhension de l'énergie nucléaire par les Etats-membres et les instances européennes, sont autant de grandes questions qui seront abordées. En outre, l'Europe fait dans ce domaine face à une forte concurrence de la part d'acteurs extra-communautaires (dont la Russie et la Chine), avec des ambitions géopolitiques fortes et des enjeux industriels et règlementaires majeurs, dont il convient de saisir l'ensemble des attendus.

Le webinaire s'est tenu suivant la règle de Chatham House.

 

Récapitulatif des débats

La Fondation pour la Recherche Stratégique, en partenariat avec l’ambassade de Lituanie en France, a tenu le 11 juin 2021 un webinaire sur les enjeux du nucléaire civil européen et de la nécessité de la coopération communautaire afin de promouvoir les valeurs européennes et le développement technologique. Les intervenants, issus du monde diplomatique, académique, règlementaire et industriel, ont partagé avec l’assistance leurs visions de ces questions.

Plusieurs grandes questions ont été abordées. En tout premier lieu la nécessité de penser le nucléaire comme une source d’énergie pouvant contribuer la réalisation des objectifs climatiques de l’Accord de Paris ainsi que de ceux du Green Deal. En France, par exemple, l’électrification de la consommation énergétique finale doit doubler – de 25% à 50% – pour que le pays puisse atteindre les objectifs fixés et le nucléaire doit faire partie de la solution pour permettre cette évolution. L’émergence de nouvelles technologies électronucléaires, en particulier autour des petits réacteurs modulables (SMR) ainsi que des usages non immédiatement électriques (production d’hydrogène, cogénération, dessalement, etc.), créent un engouement de nombreux partenaires européens. Il convient aujourd’hui, au niveau communautaire, de créer une synergie autour de ces projets afin d’éviter que l’Union européenne n’avance en ordre dispersé dans la future compétition internationale qui s’annonce et dans laquelle les grands acteurs, à commencer par les Etats-Unis, entendent tenir leur rang.

Ensuite, il importe de rappeler que, 35 ans après la catastrophe de Tchernobyl, seuls les standards les plus élevés en matière de sûreté et de sécurité pourront permettre au nucléaire de trouver pleinement sa place dans l’équation internationale de lutte contre les changements climatiques. A ce titre, il est nécessaire que l’Europe puisse être en mesure de faire entendre sa voix au plan international, en conjonction avec d’autres acteurs comme l’AIEA, pour éviter le développement de projets qui mettraient en cause la sécurité humaine et environnementale par une mauvaise gestion. La centrale biélorusse d’Astraviets en particulier cristallise les critiques sur la gestion des installations. Sa proximité très importante avec certains grands centres de population européens nécessite une vigilance renforcée. L’inadéquation du site choisi pour la centrale ainsi que la culture de sûreté des autorités biélorusses, auxquelles il faut ajouter les économies réalisées durant sa construction, soulèvent de nombreuses craintes.

Un affaiblissement des exigences en matière de sûreté et de sécurité conduirait très certainement à un discrédit profond et durable du nucléaire, lequel serait dommageable pour l’atteinte des objectifs climatiques. Le nucléaire permet ainsi une conjonction entre la lutte contre les changements climatiques et la sécurité énergétique que n’offrent pas avec la même importance d’autres technologies. Le cadre juridique renforcé au niveau européen, en particulier avec la politique de « stress tests » mise en œuvre suite à la catastrophe de Fukushima, doit ainsi être une base de dialogue en termes de sûreté avec les pays voisins de l’Union européenne (UE) afin d’éviter tout risque pour les citoyens européens.

De même, l’UE ne pourra bénéficier d’une relance globale des attentes autour de l’électronucléaire que si elle parvient à disposer d’une vision partagée, à défaut d’être consensuelle. A ce titre le prosélytisme anti-nucléaire allemand auprès de plusieurs Etats membres de l’UE se révèle fortement contreproductif, alors même que l’Allemagne ne pourra tenir ses engagements climatiques en s’appuyant uniquement sur les énergies renouvelables.

Il importe ainsi de créer de nouvelles alliances dans le domaine électronucléaire, en particulier au niveau global sur le financement des infrastructures pour faire en sorte que les pays disposant d’une culture de capitalisme d’Etat comme la Chine ou la Russie ne soient pas en mesure – par des offres de financement trop avantageuses – de s’arroger une part démesurée du maché mondial. Celle-ci doit être complétée par une alliance entre pays occidentaux pour la promotion du nucléaire, avec comme point cardinal la mise en œuvre des objectifs climatiques dans le respect des normes les plus contraignantes dans la sûreté et la sécurité.

 

L'introduction des travaux par M. Arnoldas Pranckevicius, Vice-ministre des Affaires étrangères de la République de Lituanie, a été suivie d'un panel d'experts de haut-niveau :
 
- M. Massimo Garribba, Directeur Général-adjoint, DG ENER, Commission européenne
- M. Xavier Ursat, Directeur exécutif en charge de l'Ingénierie et des projets de Nouveau nucléaire, EDF
- Mme Dalia Kreiviene, Directrice des relations économiques extérieures et de la sécurité économique, Ministère des Affaires étrangères de la République de Lituanie
- M. Marc-Antoine Eyl-Mazzega, Directeur du centre énergie, IFRI
Modération : M. Nicolas Mazzucchi, chargé de recherches, FRS