AIDE HUMANITAIRE, CRISES ET CATASTROPHES

Répondre aux urgences et prévenir les risques en Indo-Pacifique

Antoine BONDAZ, septembre 2023

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Conflits armés, régimes fragiles, crises alimentaires, épidémies et catastrophes naturelles ont des conséquences majeures pour les populations en Indo- Pacifique. À l’été 2023, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU mettait en oeuvre quatre plans de réponse humanitaire en Indo- Pacifique (Birmanie, Mozambique, Somalie et Yémen), ainsi que plusieurs plans spécifiques (Corne de l’Afrique, Kenya, Madagascar, ou encore Pakistan).

Selon la base de données utilisée par les Nations unies, 6 des 7 pays où les catastrophes naturelles sont les plus fréquentes et le nombre de personnes impactées le plus élevé ces vingt dernières années se trouvent en Indo-Pacifique. La région a été le foyer d’origine de maladies infectieuses récentes comme le SRAS, le virus Nipah ou encore la COVID-19.

La France, à travers des initiatives multilatérales, le Centre de crise et de soutien (CDCS) du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères ou encore de nombreuses ONG, apporte un soutien essentiel aux populations de la région et contribue à prévenir les crises sanitaires et les catastrophes naturelles.

ASSISTANCE HUMANITAIRE D’URGENCE

En cas de crise à l’étranger, le Centre de crise et de soutien (CDCS) assure la protection des ressortissants français (voir fiche No.2 - Démographie et représentation politique) et coordonne l’action humanitaire d’urgence de l’État. Les crédits exécutés dans le monde par le Fonds d’urgence humanitaire et de stabilisation ont été multipliés par 4 en 5 ans, et ont permis de mener des projets humanitaires et de stabilisation dans 8 pays de l’Indo-Pacifique en 20222, et dans 4 pays depuis le début de l’année (Birmanie, Mozambique, Pakistan et Yémen).

En août 2022, une aide exceptionnelle a été apportée au Pakistan à la suite des inondations. Le CDCS, en lien étroit avec la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer, a coordonné l’opération. Un vol spécial affrété par la Fondation Airbus a acheminé une équipe médicale d’urgentistes, des équipements de survie, d’hygiène et de protection, ainsi que 40 sapeurssauveteurs de la sécurité civile. Une assistance via le Mécanisme de protection civile de l’Union européenne (MPCU) a contribué à financer en partie les frais de transport et les coûts opérationnels.

Cas notable, 2 des 4 ONG qui menaient des projets humanitaires en Corée du Nord avant la pandémie de COVID étaient françaises : Première Urgence et Triangle Génération Humanitaire. Cette dernière, qui mène aussi des projets en Birmanie, au Népal et au Yémen, était présente dans le pays depuis 2000 et se concentrait sur deux objectifs principaux : la protection des personnes vulnérables et l’amélioration de la sécurité alimentaire, avec une attention particulière portée aux enfants.

AIDE ALIMENTAIRE

L’Aide alimentaire programmée (AAP) est l’instrument français de réponse aux situations d’insécurité alimentaire et nutritionnelle. Il permet de financer des organisations internationales et des ONG. En 2022, 11 pays de l’Indo-Pacifique ont pu en bénéficier, ce qui représentait 20 % de l’enveloppe globale, soit 25 millions d’euros, dont 6,2 millions pour le Yémen, 5 millions pour la Somalie et 4,8 millions pour Madagascar. La France a aussi soutenu la livraison de 25 000 tonnes de blé ukrainien en Somalie avec le navire « Neva » du Programme alimentaire mondial (PAM) fin 2022.

Dans le cadre du soutien apporté à la Corne de l’Afrique face à la sécheresse, le CDCS a engagé des crédits exceptionnels pour financer la mise en oeuvre, par l’ONG International Rescue Committee, d’un projet destiné à lutter contre l’insécurité alimentaire. L’ONG Action contre la faim opère quant à elle dans 12 pays de la région, dont la Somalie depuis 1991, les Philippines depuis 1999 et le Pakistan depuis 2004, y soutenant près de 4 millions de personnes.

CRISES SANITAIRES

Lors de la pandémie de COVID, la France s’est fortement mobilisée en Indo-Pacifique. Dès avril 2020, l’AFD a offert une réponse sanitaire et sociale à la crise via l’initiative « Santé en commun ». Elle a notamment appuyé le plan de riposte du réseau régional de surveillance épidémiologique de la Commission de  l’océan Indien, qu’elle soutient depuis 2008. En février 2022, près de la moitié des 59 millions de doses de vaccins données par la France l’avait été dans 18 pays de la région, principalement en Indonésie et aux Philippines, mais aussi au Bangladesh et en Somalie.

La France soutient les instituts de recherche, dont les Instituts Pasteur (voir fiche No.11 - Coopération scientifique et innovation), et investit dans les fonds multilatéraux spécialisés en santé. Elle est le premier contributeur à UNITAID et un soutien majeur du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Dans le cadre de la contribution au Fonds mondial, Expertise France met en oeuvre depuis 2011 L’Initiative, qui participe à la lutte contre les épidémies. Celle-ci intervient dans 8 pays de la région, dont Djibouti, les Comores et le Vietnam.

Il existe 4 conseillers régionaux en santé mondiale en Indo-Pacifique qui sont chargés, entre autres, du suivi des activités liées à ces fonds et des coopérations de santé, et 21 pays sont couverts (aucun dans le Pacifique). L’AFD soutient de nombreux projets en matière de santé à l’instar d’un projet doté de près d’1 million d’euros au Laos, qui vise à améliorer l’élimination de la transmission mère-enfant du VIH, de l’hépatite B et de la syphilis lors des soins prénataux.

Parmi les 34 pays dans lesquels l’ONG Médecins sans frontières (MSF) est intervenue en 2022, 9 sont en Indo-Pacifique3. Les plus grosses missions sont au Yémen, au Bangladesh, au Pakistan et au Kenya, et une mission exploratoire a été lancée au Sri Lanka. Les projets sont divers, comme la lutte contre la tuberculose en Papouasie-Nouvelle-Guinée, aux Philippines, et en Somalie. Handicap International conduit des projets humanitaires dans 19 pays de la région, comme au Cambodge depuis 1982 et en Inde en 1988. Au Vietnam, le ministère de la Santé a demandé à l’ONG de mettre en place dès 1989 le premier atelier orthopédique à Hanoi.

CATASTROPHES NATURELLES

La France est active en matière d’aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles (HADR). Les forces armées (voir fiche No.4 - Présence militaire et diplomatie de défense) et la sécurité civile jouent un rôle majeur (voir fiche No.5 - Coopération sécuritaire et policière).

En Asie du Sud-Est, la France fait partie du Centre régional de coordination en matière d’HADR à Singapour. Dans le Pacifique insulaire, le partenariat FRANZ avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande, signé en 1992, permet d’acheminer de l’aide humanitaire d’urgence à la demande d’un pays victime d’une catastrophe naturelle. Plus d’une quarantaine d’opérations ont été mises en oeuvre en 30 ans, dont récemment au Vanuatu (2020 et 2023), aux Tonga (2022), et en Papouasie-Nouvelle-Guinée (2021).

En 2022, les forces armées dans la zone sud de l’océan Indien (FAZSOI) ont permis d’acheminer l’aide humanitaire de la Plateforme d’intervention régionale de l’océan Indien (PIROI) au profit de la population malgache à la suite du passage du cyclone Batsirai. Cette plateforme de la Croix-Rouge française mène un programme de gestion des risques de catastrophes avec les Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Depuis 2000, la PIROI a mené 79 projets de développement et 67 opérations d’urgence.

Lors de la COP21 de 2015, la France a lancé l’initiative CREWS, qui vise à renforcer les capacités des systèmes d’alerte précoce face aux événements climatiques extrêmes. Plusieurs projets ont été mis en oeuvre, notamment au Laos, au Cambodge, et dans le Pacifique. La France soutient également la Coalition pour des infrastructures résistantes face aux catastrophes naturelles lancée par l’Inde en 2019.

L’Agence française de développement (AFD) finance depuis 2020 le projet HYDROMET, qui a pour objet de renforcer les services météorologiques, hydrologiques et climatiques dans les pays membres de la Commission de l’océan Indien, ou encore un projet de construction d’infrastructures, d’information et de surveillance des risques climatiques et environnementaux et de contrôle des inondations en Inde (voir fiche No.6 - Aide au développement et environnement).

Et dans le cadre du Fonds de soutien aux initiatives humanitaires et structurantes (FSIHS), le CDCS a financé, en 2021, le projet de réduction des risques de catastrophes dans le Pacifique Sud de l’ONG australienne Adventist Development and Relief Agency.

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