Le rôle des femmes dans l’économie, un point de vue japonais

Michiko Achilles a une longue carrière dans le domaine des ressources humaines et de l’égalité entre les hommes et les femmes dans les secteurs privé et public au Japon. Après avoir dirigé les fonctions RH de plusieurs entreprises internationales, dont Morgan Stanley, Merrill Lynch et 3M, elle a travaillé en tant que cadre supérieure pour la banque Aozora, Shiseido et SAP Japan. Elle est actuellement conseillère spéciale auprès de la ville de Yokohama, présidente du Conseil de coopération pour la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes du Bureau du Cabinet du Premier ministre, et membre du conseil d’administration de la Sumitomo Mitsui Trust Bank. Mme Achilles a été déléguée du Japon à l’APEC sur les femmes et l’économie, au Women20, au sommet mondial des femmes, et est actuellement co-représentante du G20 EMPOWER Japan.

 

Question 1 : Au cours de la période du Covid, de nombreuses femmes ont quitté le marché du travail au Japon. Peut-on les faire revenir et pourquoi ?

Beaucoup ont quitté le marché du travail et beaucoup sont revenues. En mars 2022, le taux d’emploi des femmes avait retrouvé son niveau d’avant-Covid. Le Japon est confronté à une pénurie structurelle de travailleurs en raison du déclin de la population en âge de travailler, qui a atteint son maximum en 1990 et devrait diminuer de 29,2 % par rapport au niveau de 2021 d’ici à 2050« Livre blanc sur l’égalité entre les hommes et les femmes 2022 », Bureau de l’égalité entre les hommes et les femmes, Bureau du Cabinet, Japon.. Les entreprises ont besoin de travailleurs diligents et compétents, quel que soit leur sexe. Pour attirer et retenir les travailleurs pendant la période Covid-19, de nombreuses entreprises ont commencé à proposer des formules de travail flexibles, telles que le travail à distance. Cela signifie que les travailleurs n’ont pas besoin de faire la navette entre leur domicile et leur lieu de travail. Les parents qui travaillent trouvent cela particulièrement utile pour mieux équilibrer leur vie professionnelle et leur vie privée.

Question 2 : Quels sont les principaux obstacles auxquels le Japon est confronté ?

Le taux de femmes cadres au Japon a été multiplié par 4,8 au cours des neuf dernières années, mais il n’est que de 7,5 %, ce qui est l’un des taux les plus faibles parmi les pays de l’OCDECentre national d’éducation des femmes, Japon.. En politique, la proportion de femmes est de 14,4 % à la Diète (2022) et de seulement 15,1 % dans les assemblées locales (2021)Enquête en ligne sur le mode de vie 2021 par MaVie Ltd, Japon.. Cela signifie que dans les entreprises et dans le monde politique, les décisions importantes sont prises par une majorité d’hommes et quelques femmes, malgré le fait que plus de la moitié de la population soit composée de femmes. La cause profonde en est des valeurs et des attentes anciennes, qui définissent les rôles conscients et inconscients des hommes et des femmes. Dans l’enquête gouvernementale sur l’égalité des sexes en 2019, interrogées sur l’égalité des sexes dans la société, 74,1 % des femmes ont répondu que les hommes bénéficient d’un traitement privilégié.

Question 3 : La politique de « womenomics » a-t-elle encore un avenir au Japon ?

Les « womenomics », une politique lancée par l’ancien Premier ministre Abe pour accroître le rôle des femmes dans l’économie, ont sans aucun doute un avenir. Les femmes joueront un rôle clef dans la croissance économique du Japon, à de multiples égards. En effet, le Japon compte de nombreuses femmes bien éduquées (51,6 % des diplômées du secondaire entreront à l’université en 2021, contre 54,3 % des diplômés masculinsCentre national d’éducation des femmes, Japon.) et compétentes. Par ailleurs, 80 % des décisions d’achat dans les ménages sont prises par les femmesEnquête en ligne sur le mode de vie 2021 par MaVie Ltd, Japon. et 52,6 % des femmes (seulement 28,1 % des hommes) vivent jusqu’à l’âge de 90 ans ou plus au Japon« Livre blanc sur l’égalité entre les femmes et les hommes 2022 », op. cit.. Pour mener une « vie de 100 ans » positive, les femmes doivent être économiquement indépendantes, ce qui créera un énorme marché pour toutes sortes de services et de biens. Si davantage de femmes occupent des postes de décision dans les secteurs privé et public, nous pourrons répondre plus efficacement aux besoins du marché des femmes et de la société en général. Nous avons également besoin d’une diversité de personnes travaillant ensemble pour innover. Les femmes constituent le groupe le plus diversifié et nous ne pouvons pas nous permettre de sous-utiliser leur talent.

 

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