L'Asie du Sud-Est face à un scénario de conflit à Taïwan

Résumé

L’Asie du Sud-Est serait l’une des régions les plus exposées en cas de conflit à Taïwan. Un blocus militaire ou une invasion de l’île par la Chine auraient un impact économique considérable pour les économies de la zone, à la fois dépendantes de l’industrie taïwanaise et très intégrées à la Chine, premier partenaire commercial de l’Association des Nations du Sud-Est (ASEAN) et troisième source d’investissements. Elles souffriraient de manière significative des perturbations des flux commerciaux, 50 % de la flotte mondiale de porte-conteneurs transitant par le détroit de Taïwan. Les pays de la zone seraient en outre exposés à des risques élevés d’extension du conflit en mer de Chine du Sud, de paralysie de l’ASEAN, voire d’instabilité politique.

Malgré ces fortes vulnérabilités, la question de Taïwan est loin de faire consensus au sein de l’ASEAN. Si les postures des pays membres dépendront in fine des circonstances d’une crise d’ampleur dans le détroit, les informations disponibles en sources ouvertes et les entretiens menés par l’auteur signalent d’importantes divergences au sein du bloc.

Des États comme le Brunei, l’Indonésie, la Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam semblent privilégier une forme de neutralité, tandis que le Laos, le Cambodge et le Myanmar sont susceptibles d’adopter une approche accomodante vis-à-vis de la Chine. Singapour pourrait être amené à jouer un rôle plus actif en matière d’opérations humanitaires ou de médiation, dont les contours restent néanmoins incertains. Enfin, les Philippines font figure d’exception dans la région. L’attitude de fermeté de l’administration Marcos face à la Chine dans un contexte de tensions élevées en mer de Chine méridionale, le renforcement de la coopération de défense avec les États-Unis et Tokyo, ainsi que les liens entre les Philippines et Taïwan suggèrent une implication plus active de Manille en cas de conflit. Cela reste toutefois à nuancer compte tenu des risques de représailles de la part de l’Armée populaire de libération (APL) et des importantes limites capacitaires des forces armées philippines.

Pour la France, ces positions impliquent dès lors de planifier une intervention militaire autour de Taïwan – qui se résumerait principalement à des RESEVAC (évacuation de ressortissants) – en s’appuyant a minima sur les pays d’Asie du Sud-Est. Pour autant, la centralité de l’ASEAN en Indo-Pacifique, sa proximité géographique avec Taïwan et ses liens avec l’île nécessitent de renforcer le dialogue et la coopération entre la France et les pays membres sous l’angle de la sécurité civile et de l’assistance humanitaire. Il s’agit ainsi de contribuer à la sécurisation de l’Asie du Sud-Est plutôt qu’à sa militarisation.

 

Crédit image : @jhong098

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