India and Nuclear Asia: Forces, Doctrine, and Dangers
Observatoire de la dissuasion n°70
décembre 2019
Frank O’Donnell et Yogesh Joshi ont publié en 2019 un ouvrage sur l’évolution de la doctrine de dissuasion indienne qui permet de synthétiser leurs travaux précédents sur ce sujet et d’actualiser les ouvrages de référence en la matière.En particulier, les ouvrages de George Perkovich, Ashley Tellis servent toujours de référence, mais font référence à un contexte stratégique qui a fortement évolué. Voir George Perkovich, India's Nuclear Bomb: The Impact on Global Proliferation, University of California Press, 1999 et Ashley Tellis, India's Emerging Nuclear Posture: Between Recessed Deterrent and Ready Arsenal, Rand Corporation, 2001.
Ce livre présente l’intérêt d’offrir une synthèse relativement courte de la politique indienne nucléaire, couvrant notamment la structuration de l’arsenal, les questions doctrinales et la posture de non-prolifération. Il permet d’actualiser les développements capacitaires indiens, mais également chinois et pakistanais, et d’en réaliser une lecture critique. Grâce aux travaux de recherche poussés réalisés par les auteurs, notamment dans le cadre de leurs thèses, ils apportent de nouvelles informations sur les débats et processus ayant abouti à la formalisation de la doctrine indienne autour de 2003.
Plusieurs éléments sont d’intérêt particulier dans ce nouvel ouvrage :
- Une analyse détaillée du rapport de force entre la Chine et l’Inde, de part et d’autre de la Ligne de Contrôle réel, et une description de scénarios d’escalade nucléaire ;
- Une mise en perspective de la doctrine nucléaire indienne au vu de considérations militaires et politiques ;
- Une explication du rôle crucial de certains événements, dont les attentats de Mumbai ou la négociation de l’accord nucléaire indo-américain dans la mise en œuvre de la politique actuelle.
Le sens de l’ouvrage est avant tout de pointer les risques d’escalade involontaire et accidentelle liés à la situation actuelle, notamment dus à la concomitance des systèmes nucléaires et conventionnels et à la double capacité de nombreux missiles (sur terre, air, et mer), la compétition de plus en plus affirmée dans le domaine maritime, le développement d’armes nucléaires tactiques au Pakistan et la quasi absence de dialogue stratégique entre les trois partenaires.
Les auteurs appellent donc systématiquement à davantage d’échanges au niveau trilatéral, des mesures de transparence, la mise en œuvre de mécanismes de gestion de crise, un effort pour limiter l’ambiguïté des systèmes employés et au niveau indien, la mise en place d’une revue stratégique. Celle-ci permettrait de clarifier l’adéquation de la doctrine au contexte et de s’assurer que les arsenaux, nucléaires et conventionnels, sont bien conçus en fonction des menaces et non pas dans une logique pure de développement technologique.